CAMP-FESTIF
Page créée le 29 janvier 2018 - Mise à jour le 11 juin 2018
 
    3 heures ½ (la troisième heure....)      

     De nouveau, les voitures se remettent en marche, et à travers des rues où pas une maison n’est sans drapeau, le cortège gagne l’Hôtel-de-Ville. C’est l’heure des réceptions.
 

     Dans la grande salle de l’Hôtel-de-Ville, M. Viette, ministre des travaux publics, a pris place entouré de MM. Guillain, Hendlé, Lesouef, Waddington, Félix Faure, Lebon, Goujon, Pierard ; de M. Marie Cardinne, inspecteur d’Académie de M. Cauro, secrétaire général, et de MM. Les sous-préfets.

Alexandre, l’huissier de la préfecture, dont la belle prestance et la belle tenue sont connues de tout le département, annonce les autorités, les fonctionnaires et les sociétés.
 

     C’est le Conseil municipal qui ouvre la marche. M. Le Borgne, maire de Fécamp le présente au ministre. Après quelques compliments généraux, M. Viette s’avance vers M. Le Borgne, et attache à sa boutonnière la croix de la Légion d’honneur, en disant : “Je suis heureux, monsieur le maire, de la bonne fortune qui m’était réservée de vous remettre au nom du gouvernement, la croix de la Légion d’honneur, pour les services que vous avez rendus à la ville de Fécamp et pour les sevices que vous avez rendus à la République.
 

     Le conseil municipal acclame le ministre et M. Le Borgne. Cette distinction est si méritée qu’elle rencontre le plus chaleureux accueil dont l’écho se répète bientôt à travers la ville. M. Le Borgne peut être flatté des témoignages unanimes de la sympathie de ses concitoyens ; dans de telles conditions la croix a un double mérite. Très ému, M. Le Borgne, dont on connait la simplicité et la modestie, remercie le ministre. Il attribue à son conseil, -qui proteste, -  tout ce qu’il a fait de bien à Fécamp et affirme son dévouement à la République.
 

     L’assistance applaudit avec le même ensemble quand M. Viette remet à M. Le Baillif, maire des Loges, conseiller d’arrondissement, les palmes d’officier d’académie, à M. Chédru, agriculteur, vice-président de la Société Pratique d’Agriculture, la croix du mérite agricole.
 

      Les consuls, le tribunal de Commerce, la Chambre de Commerce, les prud’hommes, le juge de paix, le clergé, les maires du canton, etc., etc., défilent devant le ministre qui a pour chacun de ceux qui, non contents de saluer, lui présentent leurs hommages, un mot spirituellement tourné. On remarque le petit discours du président du tribunal de Commerce qui, affirmant sa foi républicaine, parle du respect de ses collègues pour nos institutions, et la réponse du ministre qui, remerciant l’un de son dévouement à la République, déclare pour les autres qu’ils savent que la discipline est le premier devoir des corps constitués.
 

     M. Constantin, secrétaire de la Chambre de Commerce, président des sauveteurs, auquel sa conduite pendant la guerre a valu la Légion d’Honneur et la médaille militaire, reçoit une médaille d’argent de première classe.

     Le brave commandant des pompiers, M. Charles Lecourt, qui porte sur son épée d’honneur la date de son entrée en fonction – en 1857 – est de toutes les sociétés. Aussi repasse-t-il à chaque instant devant le ministre qui, bientôt, lui serre à chaque fois la main “comme un vieil ami”. Les maires des cantons sont l’objet d’une réception particulièrement flatteuse. Avec les douaniers, M. Viette se montre affectueux ; il nous semble bien qu’il a autrefois défendu leur cause au Palais-Bourbon.
 

     Quand les inspecteurs défilent, présentés par M. Marie-Cardinne, inspecteur d’académie, M. Viette remet à M. Albert, architecte de la ville de Fécamp, les palmes d’officier d’académie. On fait à M. Albert une ovation chaleureuse ; chacun redit avec orgueil qu’il a doté Fécamp d’écoles si belles qu’il n’y en a pas de plus belles en France. C’est que M. Albert – qui portait l’uniforme de capitaine de l’armée territoriale – est à la fois un architecte pratique et un véritable artiste.
 

     Au milieu de toutes ces sociétés, il est difficile de choisir. Deux cependant ont retenu particulièrement l’attention du ministre, La Fraternelle, société de secours mutuels, présidée par M. Delaunay, conseiller général, qui en quinze ans, a passé de 30 membres à 1 300, et le Cercle de la Jeunesse Républicaine.
 

     Le jeune homme qui présentait au ministre les membres du bureau du Cercle, a déclaré en très bons termes à M. Viette que l’espoir du Cercle était “d’aider, aux prochaines élections législatives, la troisième circonscription du Havre à avoir enfin un député républicain.” M. Viette a répondu avec beaucoup de finesse, que “la lutte persévérante conduit inévitablement au triomphe.
 

      La présence de M. le baron Piérard, député conservateur de la troisième circonscription du Havre, rendait piquante cette déclaration. M. Piérard riait, - n’ayant rien de mieux à faire en pareille circonstance, - mais il ne riait pas de très bon cœur, on le comprend de reste.

Les réceptions s’achèvent après la remise de médailles du travail à des ouvriers et la remise d’une médaille d’honneur à un contrôleur des mines qui s’est distingué dans une affaire récente.