FÉCAMP-FESTIF - Les SOCIÉTÉS et ASSOCIATIONS SPORTIVES
Page créée le 06 décembre 2017

 

     Messieurs, mes chers amis,

     Vous allez entendre proclamer les noms des heureux tireurs qui se sont classés au concours public de l’Union de tir de Fécamp et vous applaudirez aux magnifiques résultats obtenus dans toutes les catégories ; il en est une que je vous signale particulièrement : c’est celle des jeunes gens, qui ont exécuté des tirs remarquables. Robert Beaufils a fait un très beau maximum et ses camarades Pain, Jouen du Mesnil-Adélée, Leroux et Petit ont fait un 39. Il est certain qu’ils très doués pour le tir, mais ils ne seraient jamais parvenus à une telle perfection s’ils ne s’étaient pas exercés très régulièrement. Je ne cite que ceux qui ont remporté les premiers prix, mais je dois féliciter aussi tous ceux qui ont suivi assidûment les exercices de tir qui leur étaient réservés ; 103 jeunes gens ont pris part au concours des cartons de présence et vous entendrez tout à l’heure les noms de ceux qui n’ont pas manqué une seule séance et ont fait les plus beaux cartons. Pendant la durée de ce concours l’Union de Tir a offert gratuitement à ses jeunes sociétaires 2 000 séries et 15 000 balles, tant à courte portée qu’à longue distance. C’est une grande satisfaction pour le bureau de la société, de pouvoir constater le succès de ses efforts pour encourager le tir chez la jeunesse.

      Ces jeunes gens sont d’ailleurs chez nous à bonne école ; écoutez les résultats obtenus par leurs aînés qui enlèvent les premières places. Ce sont à 50 mètres, MM. Couillard, Maurice Leduc t Bouquin ; au Fusil Lebel, MM. Bouquin, Gentil et Charpentier ; à 12 mètres MM. Couillard, Rousselin et Poyet, et surtout Jacques Servain qui, seul de tous les tireurs ayant pris part au concours, a fait deux maximums ; au pistolet M. Lion, et parmi les dames, Mme Benet. Au concours des délégations, l’Union d’Yvetot et le 24e Territorial de Fécamp remportent les premiers prix et peuvent être fiers des excellents tirs de leurs représentants.

      Messieurs, quand nous voyons de tels résultats, nous admirons bien volontiers ceux qui les ont acquis ; nous constatons leur sang-froid, leur maîtrise d’eux-mêmes, la finesse de leur vue, leur habileté à se servir de leurs armes. Mais alors il nous vient à l’esprit une pensée plus grave, suscitée par l’atmosphère qui nous entoure : le tir, c’est bien un sport élégant et précis, mais c’est aussi le meilleur exercice que puisse pratiquer l’homme fier et noble, conscient du prix de sa liberté et décidé à défendre jusqu’au bout son honneur, sa famille, sa patrie. Notre patrie, messieurs ! n’est-pas que quelque chose trésaille en nous quand nous entendons ce mot bienfaisant dont nous comprenons mieux maintenant que jamais la puissance de pacification et de relèvement. Qu’est-ce donc ? une communauté d’intérêts, de langue, de sol ? plus encore : un faisceau de vies françaises, les vôtres et la mienne, celle de tous ceux qui obéissent aux mêmes lois, vibrent au souffle des mêmes espoirs, des mêmes souvenirs.
 

     Et plus encore, dans le passé, ce sont celles de nos pères qui nous ont légué des leçons d’héroïsme, de générosité, de sacrifice. De tout cela notre patrie est faite ; vertus des grands où des simples, gestes des illustres où des obscurs, c’est l’épopée qui a fait la France et dont nous ne pouvons relire les chants sans avoir au cœur la fierté de la vivre et de la continuer.
 

     Plus que jamais notre patrie a besoin de puissance et de force, pour conserver son rang dans le monde, pour défendre son existence même. Il y a peu d’années encore de beaux rêves berçaient bien des imaginations ; on affirmait la fraternité des peuples ; il semblait que, grâce à l’essor prodigieux du monde moderne, grâce aux conquêtes de la science, les frontières allaient s’abaisser et les égoïsmes nationaux disparaître. Chez nous, on se laissait aller à aimer tous les peuples, persuadés d’être payés en retour. L’attitude pouvait paraître généreuse, elle n’était que dangereuse, et il a suffi d’un geste brusque, d’une épée dont nous avons senti la pointe, pour que l’illusion se dissipât. Les formidables armements de nos voisins, les excitations et les injures de leurs journaux nous ont ouvert définitivement les yeux et nous savons que si nous voulons vivre, il faut être forts.

      Les Allemands célèbrent dans leur effort militaire, la grande œuvre nationale accomplie ; ils disent qu’elle leur assure “la liberté d’action pour une politique mondiale lucrative” ; ils entendent que ces armements leur rapportent des bénéfices encaissables ; aussi ceux qui sont faibles et en même temps riches n’ont qu’à bien surveiller leur frontière ! Il est certain que l’Allemagne n’a garni si abondamment sa cartouchière que parce qu’elle a de grands appétits et que la France est une proie vraiment bonne à se mettre sous la dent ! Le seul moyen de calmer notre impatient voisin, c’est de lui prouver que nous sommes assez forts pour ne rien craindre de lui…. Et que s’il se frotte à nous, il se piquera dur ! Notre armée va être considérablement renforcée, et nous les amis du tir, nous redoublerons encore d’efforts, n’est-ce pas ? pour préparer à notre belle armée les excellents tireurs dont elle a besoin.

Source : Bulletin de la Société 1913-1914 collection de Mme Nicole Le Grand,  avec son aimable autorisation.    

                                                                                                                                                                                                                                                       RETOUR