FÉCAMP-FESTIF - 
 
 
Page créée le 14 novembre 2017

     
     Journal de Rouen 13 août 1861

 

CONCOURS ET FESTIVAL DE FÉCAMP

     La Société mélophile de Fécamp ayant pris, comme nous l’avons annoncé, l’initiative d’une fête artistique, et s’étayant du concours puissant de la municipalité locale, a rempli son programme avec tout le succès désirable.
 

     À une heure et demie de l’après-midi, les sociétés, réunies dimanche au jardin public de Fécamp, sont allés à la mairie pour faire cortège aux autorités, et de là se sont rendues sur la place de l’Hôtel-de-Ville, désigné comme lieu de concours.

     Sur cette vaste place, garnie, en dépit d’un soleil ardent, d’une foule considérable d’habitants de la ville et d’étrangers, on avait dressé pour les spectateurs payants une estrade, en face du plancher servant en quelque sorte de table d’harmonie aux musiciens, masses chorales et fanfares. Le jury siégeait sur l’estrade.

     C’est à deux heures que s’est ouvert le concours, par un chœur admirablement interprété, qu’a fait entendre l’orphéon de Rouen.
Ensuite est venue la société chorale de Déville-lès-Rouen, qui a chanté la Noce du Village.
La fanfare d’Yvetot a succédé au chant de Déville.

     Malheureusement, le bruit des cloches sonnant les vêpres a interrompu d’une manière fâcheuse la société de Déville et la fanfare d’Yvetot.

     Par la chaleur de cette journée torride, les têtes nues des musiciens étaient grillées, les gosiers secs, les lèvres brûlées au contact des instruments de cuivre. La fanfare de Doudeville a tenu bon cependant, et a joué très agréablement une jolie redowa.

     Puis est venu le tour de la fanfare de Saint-Romain-de-Colbosc, qui a très bien exécuté des motifs d’Haydée.  Enfin, la fanfare de Pavilly s’est fait remarquer par l’assurance, le mérite des exécutants et la bonne direction de la masse.

     Le concours des instruments terminé, devait clore la séance. Mais à la suite de pourparlers entre le jury et le chef de l’orphéon de Rouen, celui-ci s’est fait entendre une seconde fois : il a chanté le chœur des Enfants de Lutèce. Après cette dernière épreuve, le jury s’est prononcé ; voici dans quel sens :

     Orphéons. 1er prix (médaille d’or du département), société chorale de Deville, sous la direction de M. Gérické ; 2e prix (médaille offerte par la société mélophile de Fécamp), Orphéon de Rouen, direction de M. Noury.

     Fanfares. 1er prix (médaille d’or de la ville de Fécamp), Société philarmonique de Pavilly, direction M. Gouel ; 2e prix (grande médaille d’argent du département), corps de musique d’Yvetot, direction de M. Dubouchet ; 3e prix (médaille d’argent de la société mélophile de Fécamp), fanfare de Bolbec, direction de M. Bibet ; 4e prix (médaille de bronze), corps de musique de Saint-Romain, direction de M. Toutain.

     Une belle médaille d’argent a été décernée à la société Saint-Joseph du Havre, dont le règlement a paru supérieur à ceux des autres sociétés musicales qui ont concouru. Avertie trop tardivement, cette société n’avait pu se faire représenter que par une députation.

     La fanfare de Doudeville, sous la direction de M. Leclerc, a reçu comme encouragement, une médaille de présence en argent.

     Après le concours, suivi d’une quête fructueuse pour les pauvres, très gracieusement faite par les dames de Fécamp, toutes les sociétés se sont rendues dans la cour de la mairie, et la société mélophile de Fécamp, qui s’était abstenue, par galanterie d’hospitalité, a joué divers morceaux fort bien exécutés. Le cortège a pris ensuite la route du Casino, c’est-à-dire de la plage et des rafraîchissements.

     Dans la soirée, un banquet a été servi dans les salons du Casino et divers toasts ont cordialement terminé cette fête.

     Un incident, auquel il ne faudrait pas cependant attacher trop d’importance, a failli troubler l’harmonie d’un concours où, plus qu’ailleurs, l’accord devait être parfait. L’Orphéon de Rouen a cru devoir refuser le second prix qui lui était décerné.

     Nous recevons à ce sujet une lettre de M. Louis Noury, dans laquelle il déclare, au nom de l’orphéon : 1° persister dans son refus, 2° récuser la compétence du jury de Fécamp, et 3° offrir une médaille en or à l’Orphéon de Deville pour le cas où, devant un nouveau jury, cet orphéon serait déclaré vainqueur d’un concours avec l’orphéon de Rouen, dont les conditions sont exposées dans la lettre de M. Louis Noury.

     Sans vouloir nous prononcer dans un débat qu’il serait bon, nous le croyons, de terminer d’une manière qui ne laisse à personne aucune fâcheuse impression, nous adressons à M. le directeur de l’orphéon de Rouen la question suivante :
     Est-il vrai que, parmi les exécutants, pour le premier chœur, se trouvaient plusieurs figurants du Théâtre-des-Arts de Rouen ; que le jury, averti du fait, ait vu dans cette adjonction d’éléments étrangers une infraction notable aux conditions du concours ; que cependant, on n’ait pas voulu purement et simplement éliminer l’Orphéon rouennais de la lutte ; qu’il ait été décidé que les choristes du théâtre se retireraient, et que l’Orphéon, réduit à ses propres forces, exécuterait un nouveau morceau, et que ce soit ce qui s’est effectivement accompli ?

     Si cela est exact, nous ne voyons pas à quel titre le jury de Fécamp devrait être récusé, après avoir accepté deux fois, et nous persistons à penser que le débat devrait être considéré comme clos définitivement.

 
                                                                                                                                                                                                                                                                                            RETOUR