CAMP-FESTIF 
Page créée le 29 janvier 2018 - Mise à jour le 11 juin 2018

    

     La parole est à M. Viette, ministre des travaux publics. Nous regrettons de ne pouvoir reproduire son discours que d’après nos notes, c’est-à-dire d’une façon très imparfaite.
 

     “je remercie d’abord, mes collègues, mes chers amis du Parlement, mais qu’ils se rassurent, je n’ai éprouvé aucune terreur. Vos demandes ne sont pas excessives. Vous les avez exposées avec une telle habileté si consommée qu’elles m’ont paru parfaitement justes et c’est là que j’ai reconnu la légendaire finesse normande.

     “Je remercie le maire de la ville de Fécamp qui a été fait en ma personne au gouvernement de la république

     “Ce n’est pas la première fois que je viens en ce beau pays. Je suis venu, ministre de l’agriculture, présider un concours régional en cette Normandie où s’est réfugiée la pomme, ce doux et savoureux fruit des paradis perdus (Applaudissements)

     “Je salue ceux qui emportent avec eux, sur le pont de leur navire, la patrie qui leur est chère et la prolonge au loin sur les eaux. (Applaudissements)

     “Le pays les suit d’un œil anxieux. Quand un malheur les frappe, il frappe chacun de nous. Leur deuil devient un deuil national. (Applaudissements)

     “C’est pour eux que l’État a commencé ces travaux et j’espère qu’il n’a pas dit son dernier mot. (Applaudissements)

     “N’a pas son port qui veut. Le vieux propos de la Cannebière est plus profondément vrai qu’on ne pense, et si vous consultiez la capitale, vous sauriez qu’elle meurt d’être appelée port de mer. (Hilarité générale)

     “Ses monuments, ses théâtres, ses boulevards, ses gares humilient Fécamp, mais jamais avec ses perspectives sur la Seine, elle jette un regard d’envie sur votre port

     “Si j’avais mes Magasins généraux ! dit Fécamp.

     “Si j’avais mes jetées dit Paris.

     “C’est que la mer est la grande route du commerce.

     “Je ne parlerais pas ici de la question économique ; de quelque façon que je pourrais en parler, je ne saurai plaire à M. Lesouef, sans déplaire à M. Faure où réciproquement (Hilarité). D’ailleurs, la grosse question économique d’aujourd’hui est la question des transports. Le camionneur fait la loi.

     “Vous avez la mer. C’est votre patrimoine. Elle est souvent mauvaise avec vous, marins ; elle vous traite en Spartiates, mais elle élève vos âmes et vous arme pour les grandes luttes de la défense de la patrie. (Applaudissements).

     “Pour tous les braves cœurs, pour tous les fils de bonne mère, il n’est rien au-dessus de la patrie et quand, à ce mot de patrie, nous ajoutons ce nom de France nous élevons nos cœurs aux sentiments les plus sublimes. (Applaudissements).

     “République, France, Liberté, tout cela est aujourd’hui synonyme ; entre ces trois choses l’union est indissoluble, le divorce impossible. Pour monter à la république votre gratitude, groupez-vous autour d’elle.

     “La République a une devise : Paix profonde à tous les hommes de bonne volonté. Je ne dis pas cela pour ceux qui l’embrassent pour mieux l’étouffer (Vifs applaudissements), mais pour ceux qui viennent à elle loyalement, prêts à la servir et à la défendre. (Applaudissements prolongés)

     “Je bois à la ville de Fécamp. Je bois à ses marins. Je leur souhaite la mer clémente et la pêche miraculeuse. (Triple salve d’applaudissements).”

        Sur ce discours exquis, tout imprégné de poésie, tout vibrant de cœur et de sympathie vraie, la fête s’achève. Personne n’oubliera ces paroles d’un orateur comme la République doit en souhaiter beaucoup.

       9 heures. (neuvième heure)

      Une dernière fois le cortège traverse les rues de la ville qui s’illumine, gagne la gare, étincelante de verres de couleur, et, à 8 h. 40, le train s’ébranle et disparait dans la nuit. Cette journée laissera de longs et heureux souvenirs à Fécamp


       11 heures (onzième heure) 

      À 10 h. 20, le train spécial s’arrêtait en gare de Rouen. Le thé était servi au buffet. À 10 h. 40 le train repartait pour Paris.